Et par manque de brise, le temps s’immobilise chante Jacques Brel dans la chanson qui a donné son nom au tout dernier projet de Jean-Sébastien Nouveau. C’est un peu ce qui se passe à l’écoute de Lost Lost Lost. On avait déjà rencontré cet architecte de sons dans Immune, Recorded Home ou encore Colo Colo. Une fois imprégné par des allers retours dans l’œuvre picturale du génial ou fou Henry Darger, Jean Sebastien Nouveau s’est mis dans la composition d’une œuvre plus tendue et plus intense. Pour ce coup, il s’est intelligemment entouré de Jonathan Grandcollot (Pan Pan Pan, Robe et Manteau) et de Jordan Geiger (Minus Story, Hospital Ship, Shearwater). Dès les premières secondes, on est happé et on se laisse perdre dans un manichéisme tourbillonnant. La douceur et la tempête, la couleur et le gris s’entremêlent pour offrir à l’auditeur une rêverie sonore comme nul autre pareil. En véritable ambianceur, le trio a travaillé sur la luxuriance des orchestrations, ce qui donne à leur premier album une forte densité. On pourrait presque dire que les six titres découlent d’un free jazz pour devenir une sorte de free post-rock. Une certaine cohérence règne aussi tout au long des morceaux et pourtant chaque titre possède une couleur bien distincte que l’on retrouve dans la série de clips qui feront ultérieurement l’objet d’un dvd. On a rarement vu une voix aussi émouvante que celle de Jordan Geiger (mis à part peut-être celle de Vic Chesnutt). La batterie a ce pouvoir shamanique de vous mettre en transe. Mais il faudra assurément une multitude d’écoutes pour percer tous les secrets des six morceaux de Lost Lost Lost. On vous avait prédit que ce serait la sensation de l’automne, c’est bien plus que ça. On est témoin de la naissance d’un grand compositeur en la personne de Jean-Sébastien Nouveau.