Le label Cranes
Records n’a pas encore un an d’existence et fait déjà parti de ces
structures dont il faut observer le moindre fait et geste. Rassembleur de
groupes aussi efficaces (Dead Horse One,
The Dead Mantra) que passionnant (Seventeen
At This Time), Cranes Records tente de placer sur la cartographie pop la
bonne vieille ville du Mans sur les mêmes latitudes qu’East Kilbride, qu’Oxford
ou Liverpool. Héritiers d’un certain âge d’or de la pop british allant du label
Creation à Factory Records, les deux membres du label ont la noblesse de penser
que la bonne musique ne vaut que si elle est soignée aussi bien dans son fond
(pop, shoegaze, post-punk…) que dans sa forme (uniquement des sorties vinyles).
Intriguant et revigorant, Ground Control To Major Tom a voulu en savoir plus et a donc posé quelques questions à ce tout nouveau label qui risque fort de souffler un bon coup de vent frais dans une France cherchant encore et toujours son propre Loveless, Nowhere et Movement.
Cranes Records est un tout nouveau label
qui n’a pas encore un an d’existence. Qui se cache derrière et comment est né
le projet ?
Nous tirons tour à tour les ficelles de ce projet, toute participation «
extérieure » est à chaque fois acceptée à bras ouverts (les groupes participent
aussi, et toujours de plein gré, souvent de manière spontanée). Le projet est
né suite à une envie profondément artistique, notre but premier restant encore
assez flou au delà d'une démarche progressiste. Cependant, chaque nouveaux
éléments qui viennent s'intégrer sont des actes réfléchis pour une cohérence qui
évolue de jour en jour.
Un an d’existence et déjà quelques beaux
articles sur le label et les groupes qui le composent (Gonzai…). Comment
expliquez-vous cette rapide reconnaissance ?
C'est un peu comme votre approche aujourd'hui, certaines personnes disent aimer
ce qu'on fait, et on arrive comme une fleur sur quelque chose qui pourrait peut
être ne pas durer. C'est un enchaînement bien heureux motivé par nos proches,
chacun entraînant Cranes Records vers le haut. Cela se fait par réseaux d'amis,
la plupart du temps. C'est la meilleure des façons pour commencer.
Ma première rencontre avec un artiste de
Cranes Records a été avec la compilation LTM#1 du label Le Turc Mécanique dans
laquelle se trouvait un titre de Seventeen At This Time. Comment est venue
l’idée de travailler avec un autre label ? Est-ce quelque chose qui se
reproduira ?
Les artistes sont assez libres, même si nous nous consultons souvent pour la
plupart de nos décisions au sein du label. Les Seventeen At This Time ont accepté de figurer sur la compilation
Cheap Recordings, nous croyons que ce choix leur incombe. Nous leur laissons le
choix de savoir ce qui est bon pour eux. Donc oui, cela se reproduira sûrement.
Le contrôle total pourrait aussi être intéressant dans un sens, mais la
précision n'exige pas forcément de dictature artistique. Et sans cette
dite-compilation, nous n'aurions peut être pas atteint ton oreille si
rapidement.
Les premières signatures du label font
beaucoup penser à une certaine période glorieuse de la pop anglaise incarnée
par des labels comme Creation ou Factory Records. Y a-t-il eu des labels qui
vous ont influencés avant même de commencer l’aventure de Cranes Records ?
On est bien sûr influencés par ce qu'on aime, on espère aussi un jour atteindre
le niveau d'excellence des labels que tu cites. Cependant nous sommes en 2012,
prendre pour exemple des maisons de disques qui figurent au panthéon d'un
certain âge d'or du disque est risqué, nous agissons plus par intuition. Et
pour l'instant nous restons satisfaits du résultat.
Être basé au Mans est-il un avantage ou
un inconvénient pour un label comme le vôtre ?
Nous avons un réel soutien grandissant au Mans, et les concernés sont très
fidèles ! Nous avons d'abord été motivé par la lassitude, on remerciera donc
toujours cette ville, tout en l'aimant et en la détestant à la fois. Créer un
label est une réponse pacifiste à une violence de l'ennui.
PS : cette ville est un enfer des Dogs en B.O.
Quelles relations entretenez-vous avec
les groupes ?
Des relations d'amis, non pas que nous prônions une idéologie de commerce
amical, mais parce qu’ils nous apportent à peu près tout ce dont nous avons
besoin pour ne jamais décrocher. Nous respectons ainsi leur démarche artistique,
et nous essayons de les guider dans leurs projets.
Vous venez de sortir un split de The
Dead Mantra et Dead Horse One, vous pouvez nous en dire un peu plus ?
Nous avons d'abord voulu sortir un single pour The Dead Mantra. S'en est suivi,
pendant l'enregistrement du single, la découverte de Dead Horse One. Les deux
groupes concernés ont finalement les mêmes influences mais des univers
distincts. Après avoir soumis l'idée aux deux groupes de s'allier dans un
projet de force, le tout s'est fait en un mois !
Vous allez rééditer The Silver Album de The December Sound. Comment en avez-vous eu
l’idée ?
Les Dead Mantra sont depuis longtemps de grands amateurs des December Sound,
c'est eux qui nous ont soumis un jour l'idée de rééditer le Silver Album. C'est
aussi un de nos albums cultes, alors au début, c'etait plus un petit rêve
qu'une idée. Ils ont accepté très vite, souhaitant sortir sur un jeune et petit
label comme le nôtre. C'est donc un honneur, et nous serons toujours étonnés de
leur modestie.
Pourquoi ce choix de sortir
essentiellement des vinyles ?
Notre démarche est une démarche de qualité, nous défendons la qualité plastique
du vinyle.
Quel est l’avenir à court, moyen et long
terme pour le label ?
A court terme, rentrer dans nos frais. Pour les sorties, un EP de Dead Horse
One à la fin de l'année, ainsi que l'album de Seventeen At This Time. L'année
prochaine, l'album de The Dead Mantra.
Si vous aviez le choix entre rééditer ou
sortir l’album d’un groupe de Creation ou Factory Records, quel serait votre
choix ?
Les albums de Factory sont déjà assez réédités. On pourrait rééditer certains
disques, pour parer aux spéculations d'aujourd'hui, mais ce n'est pas dans nos
projets.