Toute la musique que vous aimez, elle vient de là. C’est-à-dire d’où vous voulez. Les genres, sous-genres, catégories et autres chapelles sont la plaie des musiques actuelles. Sous prétexte qu’un artiste se réfère à quelques aînés passés de mode, on a trop vite tendance à lui reprocher de ne rien inventer. Un peu comme si un guitariste de blues n’avait plus le droit de revendiquer ses racines mississippiennes. C’est stupide et violemment réducteur. Car en conséquence, si l’on a par exemple été fan de shoegaze et de dream pop dans les années 90, il faudrait alors rejeter toute tentative de ranimer la flamme ? Ride, Lush, Slowdive ou les maîtres du genre, My Bloody Valentine, auraient déjà tout dit, tout écrit ? Bien sûr que non. Comme toujours, seul compte le plaisir que l’on prend à écouter un disque, à le réécouter, et plus si affinités. Ce n’est pas parce que certains ont ouvert la voie qu’il devient soudain interdit de l’emprunter.
Fauns, Anglais de Bristol, entre dans cette catégorie de groupes qu’il serait de bon ton de dénigrer, puisqu’ils reprennent les choses là où elles se seraient, dit-on, arrêtées : guitares tranchantes, mélodies rêveuses et vocaux éthérés. Trois adjectifs en effet bien galvaudés pour décrire ce qu’est le shoegazing. Et pourtant. La jolie chanteuse à frange Alison Garner et ses comparses font le job avec classe et légèreté, sans se soucier, de toute évidence, de ces vaines histoires de chapelles imprenables. Leur deuxième album, "Lights", est garanti 100 % pur plaisir. Les chansons sont là, les mélodies aussi, les guitares évidemment, et "Lights" s’écoute sans ennui du début à la fin, comme un bonbon délicatement acidulé qui donnerait envie d’en prendre vite un autre, comme une bulle de savon qu’on rêverait éternelle. Ce n’est pas un chef d’œuvre, ce n’est pas le disque de l’année ni du mois ni de la semaine, juste une œuvre sensible, humble, intègre, qui ne mérite pas qu’on la décrie sous de fallacieux prétextes théoriques, pendant que d’autres prétendants héritiers tels que The Joy Formidable dissimulent leur manque d’inspiration sous une production boursouflée.
Si vous aimez le shoegaze, vous aimerez "Lights" de Fauns. Et c’est déjà beaucoup.
Arnaud